dimanche 11 septembre 2011

après-midi pluvieuse

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Comme si la pluie l'avait emprisonné dans une carapace, le poulain ne bouge plus. Des corbeaux regagnent leur gîte à la lisière de la forêt. Une mouche remonte la vitre perlée de gouttes d'eau. Silence dans la chambre aux murs nus, mal couverts d'une peinture blanche qui devient grise. Silence à peine ponctuée par des coups de tonnerre dans le lointain !

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La pluie s'est arrêtée. Le poulain a disparu du cadre délimité par la fenêtre verte. Les corbeaux reviennent se poser sur le fil de téléphone et s'ébrouent les ailes. Un volet poussé par le vent vient claquer soudainement. Dans le silence, ce bruit sec est facile à remémorer. La lumière ne rentre plus qu'à moitié !



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Les murs sont devenus sombres. Deux fauteuils, dont le tissu est usé à l'endroit où repose la tête, se font face à côté d'une commode sur laquelle est posée un cadre avec une vache heureuse d'avoir été photographiée, et une lampe surmontée d'un abat-jour tâché. Plus loin, un lit, avec une couette verte rayée, occupe la majeure partie de la chambre. Ce sont des choses silencieuses et qui le resteront.

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Il respire ce silence, prend conscience de la densité de silence qui passe par ces objets, ou l'espace que délimitent les fauteuils, le vide entre les deux bras de bois, le vide sur le dessus de marbre gris de la commode, le vide avec les lignes vertes un peu froissées qui recouvrent le lit,...et le sifflement à ses oreilles que ne cesse pas malgré un bourdonnement de temps en temps, un hennissement, une voix qui prononce des mots indistincts, ou quelques notes de musique.

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Et le volet s'ouvre à nouveau en amenant de la clarté...puis se referme. Mais il a eu le temps d'apercevoir à l'horizon, au travers d'une ligne de nuages très sombres, la blancheur d'une éclaircie.

C'est le monde tel qu'il le voit dans cet après-midi pluvieuse, monde qui vient à ses yeux, mais aussi qu'il écoute. Le clapotis de la pluie a repris, de plus en plus fort.

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Il ne sait rien de ce vide et de ce silence. Il voit. Il écoute en plein mystère, relié à sa respiration, au mouvement du crayon, à la mouche qui se promène sur le dos de sa main.
Il n'imagine rien, ou plutôt il pense à la réalité du monde en son absence, fauteuils qui attendent sans impatience la venue d'un corps, paysage aux diverses nuances qui ne peuvent être perçues que par le regard, bruissement des ailes de mouche que seule l'oreille entend !

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Il comprend aussi que ce monde sans sa conscience disparait, comme s'il était finalement l'inventeur du monde, l'inventeur de ce qui est. Et c'est par ce silence que cela passe, silence derrière les choses, derrière ce qui apparaît, silence qui est paix encore plus profonde quand il ferme les yeux.

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Il écrit presque les yeux fermés. Le vent souffle plus fort. Le volet claque. la musique a disparu ainsi que la voix. Comme des vagues, les gouttes d'eau viennent le bercer. Il écoute seulement, nullement effrayé de n'être que là et présent dans l'absence de pensées particulières ou sentiments, là, presque devenu un fauteuil aux bras ouverts ou cri d'une hirondelle qui se prépare au retour, là laissant vivre le silence et l'espace qui l'entoure où peut se déployer la vie let les mille particularités de son chant.

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