lundi 31 octobre 2011

Delphine Galou et Leon-Paul Fargue


Accoudé (1941)
Oui mon âme, tout cela que tu vois, c’est la vie, tout ce que tu examines en soupirant, c’est la vie. Restons nous deux, cent ans et plus, restons les bras sur la balustrade, le corps appuyé au bastingage, la prudence bien affûtée, restons et résignons-nous. Ne descendons pas dans cette mélopée, ne nous confondons pas à ce bruit d’âmes fausses, de coeurs mangés aux vers, d’esprits vénéneux. Oui, restons ensemble, toi au milieu de moi et moi autour de toi, toi souffrant et moi luttant. Fermons parfois les yeux, essayons de mettre entre la rue et nous, entre les autres et nous, des océans de lyrisme muet, des remparts bourrelés de coton hydrophile. Revenons à pas lents vers les souvenirs de l’école buissonnière, chuchotons tous deux à pas de loup des images glanées dans la lente adolescence. Mon âme, on nous a roulés dans la poussière des faux serments, on nous a promis non pas seulement des récompenses auxquelles nous ne tenions pas, mais des gentillesses, des « myosotis d’amour ». On nous a laissé croire qu’on souriait, qu’on nous aimait, que les mains qui se glissaient dans nos mains étaient propres et sans épines. O glissade des déceptions et des tortures! Il n’y eut jamais pour nous ni justes effusions ni paumes sincères. On voulut même nous séparer, et te briser au fond de moi, mon âme, comme un élixir dans une coquille.
J’ai vu mentir les bouches que j’aimais ; j’ai vu se fermer, pareils à des ponts-levis, les coeurs où logeait ma confiance ; j’ai surpris des mains dans mes poches, des regards dans ma vie intérieure ; j’ai perçu des chuchotements sur des lèvres qui ne m’avaient habitué qu’aux cris de l’affection. On a formé les faisceaux derrière mon dos, on m’a déclaré la guerre, on m’a volé jusqu’à des sourires, des poignées de main, des promesses. Rien, on ne nous a rien laissé, mon âme. Nous n’avons plus que la rue sous les yeux et le cimetière sous les pieds. Nous savons qu’on plaisante notre hymen désespéré. Nous entendons qu’on arrive avec des faux de sang et de fiel pour nous couper sous les pieds la dernière herbe afin de nous mieux montrer le sentier de la fosse.
Mais nous serons forts, mon âme. Je serai le boulon et toi l’écrou, et nous pourrons, mille et mille ans encore, nous approcher des vagues ; nous pourrons nous accouder à cette fenêtre de détresse. Et puis, dans le murmure de notre attente, un soir pathétique, quelque créature viendra. Nous la reconnaîtrons à sa pureté clandestine, nous la devinerons à sa fraîcheur de paroles. Elle viendra fermer nos yeux, croiser nos bras sur notre poitrine. Elle dira que notre amour, tout cet amour qu’on n’a pas vu, tout cet amour qu’on a piétiné, qu’on a meurtri, oui, que notre amour n’est plus que notre éternité.
Alors, mon âme, tandis que je serai allongé et déjà bruissant, tu iras t’accouder à la fenêtre, tu mettras tes beaux habits de sentinelle, et tu crieras, tu crieras de toutes tes forces.
***
Léon-Paul Fargue (1876-1947) – Haute solitude (1941)

L'oubli

O, ma soeur, il est venu me chercher !
la nuit était obscure,
de lourdes nuées encerclaient le ciel.

Il est venu par ce chemin solitaire,
trempé de pluie.

J'étais là, avec mes amies,
je jouais avec mes amies,
hélas ! je ne suis pas allé à sa rencontre !

Mais il est venu, il est resté
sous les arbres, trempé de pluie !

Candidâs (Inde, XVe siècle)

Paradis

Une voix de femme,
peut-être,
qui chante dans le lointain,
et l'envol dans le soir
d'une bande d'oiseaux,
l'arbre au bord de la rivière
ruban de lumière,
et l'enfant dans l'herbe
qui attend la nuit,
quel autre paradis ?

dimanche 30 octobre 2011

Glenn Gould





Ayant bu des mers entières, nous restons tout étonnés que nos lèvres soient encore aussi sèches que des plages, et toujours cherchons la mer pour les y tremper sans voir que nos lèvres sont les
plages et que nous sommes la mer.

Attar (vers 1142-mort en 1190-1229)

Mélopée

Pluie de feuilles mortes ?
As-tu déjà entendu
dans le brouillard
cette chanson monotone ?

Feuilles de hêtre,
feuilles de chêne
lentement
touchent le sol
et poussent
un dernier soupir !



Seuls les pins et les épicéas
se taisent
avec les mélèzes
qui se dépouillent en silence !

samedi 29 octobre 2011

La grande cascade, René Aubry

Horizon

Cela se passait sur la jetée d’Honfleur, le ciel était pur. On voyait très clairement le phare du Havre. Je restai là en tout bien dix heures. A midi, j’allai déjeuner, mais je revins aussitôt après.

Quelques barques s’en furent aux moules à la marée basse, je reconnus un patron pêcheur avec qui j’étais déjà sorti et je fis encore quelques autres remarques. Mais en somme, relativement au temps que j’y passai, j’en fis excessivement peu.

Et tout d’un coup vers huit heures, je m’aperçus que tout ce spectacle que j’avais contemplé pendant cette journée, ça avait été seulement une émanation de mon esprit. Et j’en fus fort satisfait, car justement je m’étais reproché un peu avant de passer mes journées à ne rien faire.

Je fus donc content et puisque c’était seulement un spectacle venu de moi, cet horizon qui m’obsédait, je m’apprêtais à le rentrer. Mais il faisait fort chaud et sans doute j’étais fort affaibli, car je n’arrivai à rien. L’horizon ne diminuait pas et, loin de s’obscurcir, il avait une apparence peut-être plus lumineuse qu’auparavant.

Je marchais, je marchais.

Et quand les gens me saluaient, je les regardais avec égarement tout en me disant : « Il faudrait pourtant le rentrer cet horizon, ça va encore empoisonner ma vie, cette histoire-là », et ainsi arrivai-je pour dîner à l’hôtel d’Angleterre et là il fut bien évident que j’étais réellement à Honfleur, mais cela n’arrangeait rien.

Peu importait le passé. Le soir était venu, et pourtant l’horizon était toujours là identique à ce qu’il s’était montré aujourd’hui pendant des heures.

Au milieu de la nuit, il a disparu tout d’un coup, faisant si subitement place au néant que je le regrettai presque.

Henri Michaux - La nuit remue



Envers et contre tout

 Envers et contre tout,
il monte la garde
loin du regard
où l'absurde gagne !

Dans un océan de désastres
il sauve de la noyade
un coffret de perles :

l'envol d'un héron,

le feuillage d'or
près de la maison
comme un buisson ardent,

des cygnes de neige
qui quémandent du pain,



et les lumières dans la colline
qu'absorbe la nuit !

si peu vraiment !

vendredi 28 octobre 2011

Shannon Barnett au trombonne

L'instrument joué par Simon !

la flûte de roseau

Ecoute la flûte de roseau et sa plainte, comme elle chante la séparation : 
on m'a coupé de la jonchaie, et dès lors ma lamentation fait gémir l'homme et la femme. 
J'appelle un coeur que déchire la séparation pour lui révéler la douleur du désir. 
Tout être qui demeure loin de sa source aspire au temps où il lui sera uni. 
Feu et non vent : tel est le son de la flûte. Périsse qui n'a point cette flamme !
Feu de l'amour dans le roseau, ardeur de l'amour dans le vin ! 
Ney, compagnon pour qui vit séparé de l'Ami, et dont les accents déchirent nos voiles, lui poison et andidote, confident et amoureux, qui jamais vis ton égal ? 
 
Rumi
 
 

jeudi 27 octobre 2011

Lever la tête


Ciel du soir
presque violet !
Envol bref
d'étourneaux,
comme pour
souligner
l'immensité,
là, juste
au dessus
de nos têtes !



La cime
des arbres
savoure
le calme
qui s'installe

Il caresse
l'écorce d'un cèdre
devenu son ami !



Jamais il n'a raté
un de leur rendez-vous !

Sophie Hunger - Monday's Ghost

Tour de chant


Encore un petit coup de vie
Pour voir si ça n'ira pas mieux.
Parfois les orages dévient
Et le guignon nous dit adieu.

Si ce n'est pas trop demander,
Encore un petit coup de vie
Bien au chaud et les yeux bandés
Pour adoucir les tragédies.

Les yeux bandés, la bouche ouverte,
En voir de toutes les couleurs,
Des pas mûres comme des vertes,
Mais garder l'espoir du bonheur.

Cahin-caha, caché, debout,
De vie encore un petit coup
Avant de sucer l'autre bout
Des fraises mûrissant pour vous.


Norge, Le Stupéfait, Gallimard 1988, p. 87.

En un clin d'oeil

En un clin d'œil

On pressent bien
la patience du soleil
derrière la grisaille.

Dehors se croisent
des voitures, des visages,
c'est le tumulte,
le brouhaha !

Mais le silence continue,
un moineau sur un rameau
est bercé par le vent.


On ouvre les yeux
le matin sur le monde,

on les ferme le soir
et il n'y a plus rien !

mercredi 26 octobre 2011

Se détendre !

l'empathie


un texte de Christian Bobin


L'empathie c'est, à la vitesse de l'éclair, sentir ce que l'autre sent
et savoir qu'on ne se trompe pas,
comme si le coeur bondissait de la poitrine pour se loger dans la poitrine de l'autre.
C'est une antenne en nous qui nous fait toucher le vivant :
feuille d'arbre ou humain.
Ce n'est pas par le toucher qu'on sent le mieux mais par le coeur.
Ce ne sont pas les botanistes qui connaissent le mieux les fleurs,
ni les psychologues qui comprennent le mieux les âmes, c'est le coeur.
Le coeur est un instrument d'optique bien plus puissant que les télescopes de la Nasa. C'est le plus puissant organe de connaissance,
et c'est une connaissance qui se fait sans aucune préméditation,
comme si ce n'était plus nous qui faisions attention à l'autre,
comme s'il n'y avait plus qu'une attention pure
et une bienveillance fondée sur la connaissance de notre mortalité commune.
Ce qui est très curieux, car qui est-on, à ce moment-là ?
Toute sagesse qui vient dans le carcan d'une méthode est dépassée par le coeur.
Ce moment qui foudroie toutes les carapaces d'identité,
qui saute par-dessus l'abîme qui me sépare d'autrui
et où le coeur de l'autre est deviné, jusqu'en ses moindres battements,
donne la plus grande lumière possible sur l'autre.
Dans l'empathie, on peut prendre soin de l'autre
comme jamais il ne prendra soin de lui-même,
par une attention qui est tendue comme un rai de lumière,
mais il n'y a aucune emprise psychique sur lui.
C'est l'art double de la plus grande proximité, et de la distance sacrée.
(…)
Sans le coeur, il n'y a pas d'empathie, car avoir du coeur, c'est sortir de soi,
mais s'il faut ressentir l'autre jusqu'à presque le devenir,
il faut en même temps maintenir une distance sous peine de sombrer dans la fusion.
L'empathie livrée à elle-même va à l'infini et par là elle se perd.
C'est par empathie que la mère arrive à entendre les pleurs de l'enfant
juste avant qu'ils n'arrivent, mais c'est par fusion que certaines mères ligotent l'âme de l'enfant à la leur de manière infernale :
la limite de l'empathie, c'est la fusion, qui est de l'entre-dévorement.
Dans l'état de fusion totale, une mère n'aura même pas besoin de parler pour que
l'enfant agisse, parce qu'elle lui parle à l'intérieur de lui.
Dans la fusion, la proximité est terrible
parce que quelqu'un a pris le pouvoir sur quelqu'un d'autre.
La distance, qui n'est peut-être qu'une ligne de démarcation, est faite avec le
couteau de la parole. C'est le langage qui empêche l'anthropophagie de la fusion.

mardi 25 octobre 2011

Laissez-vous bercer !

l'or des ginko bilobas

L'or des ginko bilobas,
le feu des dahlias,
l'étoile des nymphéas
ont pris sa place
avec le rire d'un enfant,
le croassement plaintif
sous les rhododendrons
des corbeaux sérieux !



Il pense à la vie,
à ce jour d'octobre.
Pour les autres,
pour lui-même
plus d'opprobre !
Une ou deux
amples respirations,
l'oppression cesse
et tout sourit !

lundi 24 octobre 2011

le sarod d'amjad ali khan


Le sarod (ou sarode) est un instrument de musique à cordes pincées apparu au XIXè siècle au nord de l'Inde et utilisé en musique indienne classique. C'est un luth hybride issu du dhrupad rabâb, un instrument indien ancien et du rabâb afghan. ...

Si bref

-1-

Chaque arbre singulier vient à sa rencontre, chaque feuille dans sa densité première. Chaque branche qui s'élance vers le ciel raconte la nudité splendide du monde et à l'instant même chaque seconde devient un joyau !



-2-

Qu'est ce paysage soudain rendu à lui-même ? paysage qui voit autant qu'il est vu ? Cette porte qui s'ouvre soudain, il la passe seulement dans la fraicheur d'un air qui va jusqu'à la moelle des os !

-3-

Cette splendeur isole le flot de sa pensée et le ramène à la vérité de ce qu'il est vraiment. L'envol de pigeons au dessus du cèdre signe l'éclair de qui se passe, vie soudaine qui lui montre l'espace de sa liberté !



-4-

Il n'y a plus ici et là-haut, et le fleuve infranchissable. le monde est devenu un signe où il respire parce que rejoint dans son attente qui ne trouvait jamais les mots. Palpite en lui ce qui peut naitre, grandir, s'élargir lorsque tout ce qui l'habite devient pétales au fil de l'eau.

-5-

C'est comme s'il entendait une voix discrète : "laisse aller jusqu'à ta souffrance même, toutes ces peines, tout ce mépris ! Ils t'ont ouvert le chemin par l'évidement du cri et tu peux accueillir maintenant le seul matin qui va jusqu'à la fin !"



-6-

Le soir venu, bercé par la plainte d'un sarod, comme lui parait loin le bruit de la ville ! Les nuages troués de bleu glissent comme tant de pensées folles et vaines. Ce qui reste quand la nuit engloutit sa conscience dans un sommeil sans rêves, cette absence, quelle est-elle ?

-7-

Et ses yeux qui s'ouvriront demain matin, laisseront-ils une place à ce qui est louange silencieuse et simple, comme ces arbres radieux dans le parc à midi, sortis pour lui, et il les en remercie, de leur gangue où ils ne peuvent être vraiment !

dimanche 23 octobre 2011

Amandine Bayer, une violoniste exceptionnelle


Eh ! regarde-moi !

Arbre ombre chinoise
aux branches de corail
posté à l'entrée du parc
sous une pluie fine,
enfin, il l'aperçoit !
Ou peut-être est-ce l'arbre
qui ce soir lui a parlé :
"Eh ! Regarde-moi !"

samedi 22 octobre 2011

Au large

Il était au large,
qu'il était bon de respirer,
avec l'ampleur de l'arbre,
la hauteur du martinet,
la force des fleurs,
l'eau fraiche du poisson,
les élans de la libellule,
et la danse du papillon !

Il était au large,
déchiré, le filet !
abasourdie, la nuit !
terrassée, l'angoisse !
étrillée, l'âme !
arrachée, la fuite !

Il était au large,
avec ce chant de vivre
qui montait encore plus haut !

Omar Faruk Tekbilek - Yunus!




Yunus Emre, écrivain turc (v. 1238-v. 1320) considéré comme l'un des poètes les plus importants de la poésie mystique populaire turque.

L'amour est soleil

O amis, entendez-moi ;
l'amour est pareil au soleil

et le coeur sans amour
est semblable à une pierre noire. Que peut pousser d'un coeur de pierre ?
Celui qui le porte n'a sur la langue que venin,
et ses paroles, même les plus douces,
sont violentes comme la guerre. Le coeur riche d'amour est ardent
et devient tendre comme le cierge ;
les coeurs de pierre sont comme l'hiver :
hiver noir, hiver dur comme la glace. A la porte de notre Roi,
au service de notre Seigneur,
les étoiles des amoureux
sont pareilles aux sentinelles.

Yunus, renonce à toutes préoccupations,
à tous les soucis de ce monde.
L'homme doit pouvoir d'abord s'emplir d'amour :
après quoi, il pourra se dire derviche.

Yunus Emre.





.

vendredi 21 octobre 2011

Dhafer Youssef & Tigran Hamasyan quartet


De lui-même

De lui-même,
il est l'anémone
au pieds  des grands hêtres
qui se chargent de soleil,





il est la fourmi
qui monte aux branches
chercher le sucre des bourgeons,



il est la grume moussue
au bord du fossé
qui espère les pas d'un enfant !



De lui-même,
il ne dira plus rien !

jeudi 20 octobre 2011

La compassion pour soi


Si vous ne vous aimez pas, vous ne serez jamais capable d'aimer quelqu'un d'autre.
Si vous n'êtes pas aimant envers vous-même, vous ne pouvez pas être aimant envers autrui.
Tout ce que vous êtes envers vous-même, vous l'êtes envers les autres.
Faites-en un principe de base. Si vous vous détestez, vous détesterez les autres et l'on vous a appris à vous détester. Personne ne vous a jamais dit: "Aime-toi !"
L'idée même semble absurde ; s'aimer soi-même ? L'idée même n'a pas de sens, s'aimer soi-même ? Nous pensons toujours que pour aimer, quelqu'un d'autre est nécessaire.
Mais si vous ne l'apprenez pas avec vous-même, vous ne serez pas à même de le pratiquer avec autrui. L'on vous a répété, constamment conditionné : "tu n'as aucune valeur".
De tous les côtés l'on vous a démontré, l'on vous a dit, que vous êtes sans valeur, que vous n' êtes pas tel que vous devriez être, que vous n'êtes pas accepté tel que vous êtes.
Il y a de nombreux: "tu devrais" suspendus sur votre tête et ces : "tu devrais" sont presque impossibles à accomplir. Et lorsque vous ne pouvez pas les accomplir, lorsque vous échouez, vous vous sentez condamné. Une haine profonde surgit en vous contre vous-même.
Si vous êtes plein de haine, où allez-vous trouver de l'amour ?
Le premier pas est : acceptez-vous tel que vous êtes ; laissez tomber tout les: "je devrais".
Ne portez aucun "il faudrait, je devrais" dans votre coeur ! 
Vous n'avez pas à être quelqu'un d'autre ; la vie ne s'attend pas à ce que vous fassiez quelque chose qui ne vous appartient pas. Vous avez simplement à être vous-même.
Détendez-vous et soyez simplement vous-même.
Soyez respectueux envers votre individualité et ayez le courage de signer avec votre propre signature ; ne continuez pas à copier les signatures des autres. La vie ne s'attend pas à ce que vous deveniez un Jésus ou un Bouddha ou un Ramakrishna ; elle s'attend simplement à ce que vous vous deveniez vous-même. Lorsque vous n'essayez pas de devenir un autre, alors vous vous détendez simplement ; alors une grâce surgit, alors vous êtes plein de grandeur, de splendeur, d'harmonie... parce qu'il n'y a alors aucun conflit ! Nulle part où aller, rien à se battre contre; rien à forcer, à vous imposer violemment à vous-même. Vous devenez innocent.

Dans cette innocence, vous ressentirez compassion et amour pour vous-même.
Les roses fleurissent si belles parce qu'elles n'essaient pas de devenir des lotus.
Et les lotus fleurissent si beaux parce qu'ils n'ont pas entendu les légendes des autres fleurs.
Tout dans la nature va si merveilleusement en harmonie, parce que personne n'essaie de rivaliser avec quelqu'un, personne n'essaie de devenir un autre. Tout est comme il doit être.

Voyez clairement cela ! Soyez simplement vous-même et rappelez-vous que vous ne pouvez pas être autre chose, quoi que vous fassiez. Tout effort est futile, vous avez juste à être vous-même.
Il y a seulement deux façons d'être. L'une en rejetant ; vous pouvez rester le même; en condamnant, vous pouvez rester le même. L'autre en acceptant ; en capitulant, en ayant du plaisir, en célébrant, vous pouvez être le même. Votre attitude peut être différente, mais vous allez rester tel que vous êtes, la personne que vous êtes. Une fois que vous vous acceptez, la compassion surgit et ensuite vous commencez à accepter les autres !

Osho




 

Un petit remontant !

.

mercredi 19 octobre 2011

Suis-je un aigle qui se prend pour un poulet ?

L'aigle des basses-cours

Un homme trouva un œuf d'aigle et le plaça dans un poulailler. L'aiglon vint au monde avec une couvée de poussins et poursuivit sa croissance avec eux.

Se prenant pour un poulet, l'aigle ne cessa d'imiter le comportement des gallinacés qui l'entouraient.

Il grattait la terre afin d'y trouver des vers et des insectes. Il gloussait et caquetait. Il battait des ailes ne s'élevant qu'à quelques centimètres du sol.

Les années passèrent et l'aigle devint très vieux.

Un jour il aperçut, volant dans le ciel sans nuages, un magnifique oiseau. Avec une grâce majestueuse, ce dernier se laissait porter par les courants, agitant à peine ses puissantes ailes dorées.

Le vieil aigle le regardait, émerveillé :

Quel est cet oiseau ? demanda-t-il.

C'est l'aigle, le roi des oiseaux, lui répondit un de ses compagnons.

Il appartient au ciel.

Nous, nous appartenons à la terre - nous sommes des poulets.

C'est ainsi que l'aigle, dans la certitude qu'il avait d'appartenir à la basse-cour, vécut et mourut en poulet."


Anthony de Mello

mardi 18 octobre 2011

Il disparait

Il disparait
derrière la fleur
de plantain
de brume rose



Il s'absente
devant le chuchotement
de la forêt



Il se dérobe
devant l'enfant
qui chante
et donne son coeur
sans dérobade



Il s'efface
auprès du violon
qui sait rejoindre
l'espérance en germe
malgré le sang





Il s'éclipse
pour que le matin
garde sa fraicheur de menthe
et de mésanges joyeuses
sous les branches !


lundi 17 octobre 2011

Merci

leçons d'oiseaux

-1-

Sautille la bergeronnette,
légère danseuse
entre les herbes,
vive et joyeuse d'être !
Aussi légère
peut-être la vie
pour un coeur aimant !



-2-

"Pas de grands mots,
s'il te plait !"
lui a dit le pinson
sur sa corniche de pierre.
Par ses couleurs
et son chant,
il est bien plus poète !
Pinson, apprends-lui
à chanter vrai !

dimanche 16 octobre 2011

Félix Leclercq - Le p'tit bonheur

l'empêchement est devenu l'épaule

-1-
Inaltérable espace où il est vraiment, comme l'autre soir, lorsque la lumière douce d'octobre était juchée sur les houpiers des hêtres de la colline, soudaine communion dans la disparition de soi, comment chanter cela ?
-2-
Neuf à chaque instant, avec le corbeau au sommet du sapin qui ouvre le bec et avale le bleu du ciel, ou l'apparition d'un pigeon qui passe de cheminée en cheminée et révèle aussi l'immense à l'intérieur de soi, neuf avec un merci au bord des lèvres dans la fraicheur d'automne, n'est-ce pas ce qui lui arrive au sein de la fragilité ?



-3-
Goûter seulement ce moment où il dépose tout ce qu'il croit être, bras sur les accoudoirs, comprenant qu'il ne comprendra jamais, s'abandonnant à cette voix fière de femme afghane qui chante sa grandeur sans aucun orgueil !

-4-

Il est cela, oui, vraiment, vie qui passe, dépasse tout épuisement, lèvres qui formulent une louange muette malgré la migraine, et les yeux tirés par la fatigue. Il est cela, parce que c'est là que se révèle l'humain, hors de sa prison de chimères...

-5-

C'est là par le regard où brille la flamme de la vérité des liens tissés avec patience.....comme pendant le café, dans la véranda noyée de soleil pâle, où, plus loin que les mots échangés, il y a une porte qui s'ouvre, puis une autre, et l'élan.. C'est là que lui apparait l'infini du chemin...

-6-

...traversée de l'ombre des sapinières qui n'est pas venue à bout du désir de l'orée, enfin au large dans la tunique d'un rêve unique, bonté et douceur du monde que découvre un regard innocenté de sa nuit !



-7-
Ce qui était empêchement est devenu l'épaule sur laquelle s'appuyer, pour contempler plus large et plus vrai comme par la fenêtre, le bouleau à la cime courbée, la pointe noire du sapin et la flamme du peuplier qui semblent soudain être plus que des arbres, radieux témoins d'un chant à rejoindre

samedi 15 octobre 2011

Mohammed Eghbal, Christa Eghbal

Parterre de fleurs

"Le plus infime parterre de fleurs doit être considéré comme un puissant soutien. Toute plante nous élargit. La moindre disparition au niveau végétal ne fait que nous parquer un peu plus dans l'insignifiance, dans l'absurde d'une vie baclée comme un devoir insipide"

Pierre-Albert Jourdan

C'est la nuit qui demande

C'est la nuit
qui demande l'aube,
le fond qui désire
lumière !

Si le cerisier
avait une âme
tu verrais la blancheur
de ces fleurs
au coeur de l'hiver !

Si tu entendais
la jonquille respirer,
combien ton souffle
te paraitrait à l'étroit !


vendredi 14 octobre 2011

Kabir en Inde, chanté par Shabnam Virmani

"Si longtemps que le tigre reste dans la forêt,
si longtemps, la forêt ne peut fleurir.
Mais lorsque le chacal a mangé le tigre,
tous les arbres de la forêt se couvrent de fleurs"
Kabir

En Inde, on chante des poèmes de Kabir dans les écoles.....


et à la maison


Le grand sourire

"Alors, c'est à ce moment là que l'on peut voir tout à coup sur le visage d'un malade le grand sourire ; il se sent envahi par une grande force dans la profondeur même de sa faiblesse. La force du moi existentiel basée sur ce que l'on a, ce quel'on sait, ce que l'on peut est brisée, elle cède enfin la place à ce que l'on est...!"

K Graf Durkheim

Myosotis

D'un myosotis bleu si frais,
ciel turquoise en pointillé,
vous ne connaitrez jamais
la fin de l'histoire
dont vous êtes les messagers,
avec tant d'autres fleurs
qui mériteraient des baisers
car tout commence
avec des yeux qui s'ouvrent
comme des pétales,

et tout finit
avec la douceur du vent
qui d'une fleur fanée
ne laisse que le coeur !

jeudi 13 octobre 2011

Azam Ali


et si vous avez aimé


Ici et maintenant


"Nous ne nous tenons jamais au temps présent. Nous anticipons l'avenir comme trop lent à venir, comme pour hâter son cours ; ou nous rappelons le passé, pour l'arrêter comme trop prompt : si imprudents, que nous errons dans les temps qui ne sont pas nôtres, et ne pensons point au seul qui nous appartient ; et si vains, que nous songeons à ceux qui ne sont plus rien, et échappons sans réflexion le seul qui subsiste. C'est que le présent, d'ordinaire, nous blesse. Nous le cachons à notre vue, parce qu'il nous afflige ; et s'il nous est agréable, nous regrettons de le voir échapper. Nous tâchons de le soutenir par l'avenir, et pensons à disposer les choses qui ne sont pas en notre puissance, pour un temps où nous n'avons aucune assurance d'arriver.
      Que chacun examine ses pensées, il les trouvera toutes occupées au passé et à l'avenir. Nous ne pensons presque point au présent ; et, si nous y pensons, ce n'est que pour en prendre la lumière pour disposer de l'avenir. Le présent n'est jamais notre fin : le passé et le présent sont nos moyens ; le seul avenir est notre fin. Ainsi nous ne vivons jamais, mais nous espérons de vivre ; et, nous disposant toujours à être heureux, il est inévitable que nous ne le soyons jamais."
PASCAL
Pensées, Brunschvicg 172 / Lafuma 47

mercredi 12 octobre 2011

Avez-vous le coeur comme un verre d'eau ou un océan ?

Si nous sommes troublés par des événements ou des agressions extérieurs, c’est de notre propre responsabilité.
Si une personne vous met en colère, ce n’est pas elle la responsable, c’est qu’il y a de la colère en vous. S’il n’y avait pas de colère en vous, qu’est-ce qui lui aurait répondu ?
Mettez du feu dans l’eau, le feu ne brûle pas l’eau, le feu n’est pas nourri par l’eau. Mettez du feu dans du coton, le feu est nourri, il s’enflamme. La colère qui est en vous nourrit la flamme, la paix qui est en vous l’éteint.
Cessez de dire, cette personne m’énerve ; dites plutôt je m’énerve avec elle.
Elle ne peut réveiller que ce qui est déjà en vous. C’est pour cela que le sage n’accuse jamais personne, il s’accuse lui-même.
Mettez des cendres dans un verre, celui-ci sera pollué.
Mettez ces mêmes cendres dans un océan, elles seront vite oubliées.
Avez-vous le cœur comme un verre d’eau ou comme un océan ?".


Shenouda III, Patriarche copte

Tableau de Bang Hai Ja, artiste peintre, http://banghaija.com/

mardi 11 octobre 2011

Lux eterna

Chant 2

Rien en ce monde
de tout ce que j'ai pu boire
et manger,
de tous les pays
où j'ai voyagé,
de tout ce que j'ai pu voir
et entendre,
de tout ce que j'ai pu toucher
et comprendre,
rien, rien
ne m'a rendu aussi heureux
que les chants !

Nazim Hikmet

Chant 1

Et le chant intérieur
est le seul signe
que cendres et ombres
ne sont pas nôtres.

Il ne sera jamais
le mal qui cherche
sa demeure.

L'arbre supporte
bien le gui
et ses branches
atteignent les étoiles.

Il  n'est pas
le souffle de la nuit,
mais un chant qui grandit
une flamme qui cherche
la main d'où elle jaillit !

dimanche 9 octobre 2011

Rachmaninov - Fabio Luisi et Berezovsky et Piano Concerto No.2 Mvt.1


Dans le train

Des phares de voiture,
yeux de fauve,
rouges ou jaunes,
vont et viennent !

Sur la vitre
des fils de pluie
comme des rayures
ajoutent encore
à l'obscurité.

A quoi,
à qui penser !

Epaisseur de ce moment,
seul dans le train,
qui ne reviendra plus.

Il ferme les yeux,
là, tout de suite,
pour que cette tendresse
qui l'habite
aille couler plus loin !

samedi 8 octobre 2011

Ce n'était qu'une chanson

-1-

La pluie a tout envahi, et la nuit vient en silence éteindre le ciel gris. Reste la lampe vivante, un rond de lumière, des livres en désordre, et quelques notes de Litzt qui permettent au fauteuil d'être une barque errante.



-2-

Il garde les yeux ouverts, ne regarde que cette chambre-bureau où il écrit. les hirondelles sont loin. la fenêtre reste close. Le radiateur craque. Et il n'y a en lui aucun rêve. Est-ce une île qu'il a rejoint, ou son étoile qui brille simplement et qu'il aime ?

-3-

Où irait-il courir maintenant ? Il est, avec lui-même, son meilleur compagnon, malgré ce jour gris dans la bruine d'octobre qui estompe les arêtes des maisons, et puisque c'est le temps de chanter, l'eau qui vient du ciel emporte une peine ou deux qui ne sont rien !



-4-

Il accepte cette soirée solitaire que berce une harpe. Sous l'assaut des nuages, les feuillages qui brunissent ne protestent pas. Quand il n'y a plus rien à saisir, vivre peut être calme. Il suit chaque note de musique comme on tourne les pages d'un livre qui contient un secret qu'on n'a pas besoin de comprendre.



-5-

Il peut y avoir grandeur à cet acquiescement, accueillirt le tic-tac d'un réveil, sentir la plume en voyage sur le papier, entendre le pas d'un enfant dans l'escalier et la porte qui claque, voir par la fenêtre les lumières qui s'allument de l'immeuble, d'autres univers, d'autres histoires



-6-

Et son poème à lui est un dessin sur le sable, un soleil qui sourit, les deux yeux d'une maison, des choses que l'on ne retient pas. le vent, les vagues sont là pour emporter les mots, afin que seul le silence reste près du coeur qui s'apaise.

-7-

L'essentiel est qu'il est tout oublié, juste au moment où il se lève, après avoir posé son stylo. Ce n'était qu'une chanson où s'envole le temps, des notes, des pensées, des oiseaux qui vont vers le Sud. Lui restera avec la grisaille, heureux d'une lumière qui ne le quitte jamais !!

vendredi 7 octobre 2011

Eckhart Tolle


Dans votre vie, la relation primordiale est celle que vous entretenez avec le moment présent, avec toute forme que le moment présent prend.
C'est-à-dire avec ce qui est et ce qui arrive.
Si votre relation avec le moment présent est dysfonctionnelle, cette dysfonction viendra se refléter sur toutes vos relations et sur toutes les situations dans votre vie. On pourrait simplement définir l'ego en disant qu'il est un lien dysfonctionnel avec le moment présent.
Ce n'est qu'à cet instant même que vous pouvez décider du genre de relation que vous voulez entretenir avec le moment présent.
Est-ce que je veux faire du moment présent un ami ou un ennemi ?
Comme le moment présent est indissociable de la vie, vous décidez en fait du genre de relation que vous voulez entretenir avec la vie.
Une fois que vous avez décidé que le moment présent sera votre ami, il vous revient de faire le premier pas.
Adoptez une attitude amicale à son encontre, accueillez-le quelle que soit la forme qu'il prenne. Les résultats ne tarderont pas à se manifester.
En effet, la vie deviendra bonne à votre égard, les gens vous aideront, les circonstances collaboreront.
Une seule décision peut changer toute votre réalité.
Mais il s'agit d'une décision qu'il vous faut constamment reprendre, jusqu'à ce qu'elle devienne une seconde nature.

Youn Sun Nah

et si vous avez aimé

jeudi 6 octobre 2011

Kamkar Ensemble

LES 3 PORTES DE LA SAGESSE

Un Roi avait pour fils unique un jeune Prince
courageux, habile et intelligent. Pour parfaire
son apprentissage de la Vie, il l'envoya auprès
d'un Vieux Sage.
"Eclaire-moi sur le Sentier de la Vie", demanda
le Prince.
"Mes paroles s'évanouiront comme les traces
de tes pas dans le sable, répondit le Sage.
Cependant je veux bien te donner quelques indications.
Sur ta route, tu trouveras 3 portes. Lis les préceptes
indiqués sur chacune d'entre elles. Un besoin
irrésistible te poussera à les suivre. Ne cherche
pas à t'en détourner, car tu serais condamné à
revivre sans cesse ce que tu aurais fui.
Je ne puis t'en dire plus.
Tu dois éprouver tout cela dans ton coeur et dans ta chair.
Va, maintenant. Suis cette route, droit devant toi."
Le Vieux Sage disparut et le Prince s'engagea
sur le Chemin de la Vie.
Il se trouva bientôt face à une grande porte sur
laquelle on pouvait lire "CHANGE LE MONDE".
"C'était bien là mon intention, pensa le Prince,
car si certaines choses me plaisent dans ce monde,
d'autres ne me conviennent pas." Et il entama son
premier combat. Son idéal, sa fougue et sa vigueur
le poussèrent à se confronter au monde, à entreprendre,
à conquérir, à modeler la réalité selon son désir.
Il y trouva le plaisir et l'ivresse du conquérant,
mais pas l'apaisement du coeur. Il réussit à changer
certaines choses mais beaucoup d'autres lui résistèrent.
Bien des années passèrent.
Un jour il rencontra le Vieux Sage qui lui demande :
"Qu'as-tu appris sur le chemin ?" "J'ai appris,
répondit le Prince, à discerner ce qui est en mon
pouvoir et ce qui m'échappe, ce qui dépend de moi
et ce qui n'en dépend pas". "C'est bien, dit le
Vieil Homme. Utilise tes forces pour agir sur ce
qui est en ton pouvoir. Oublie ce qui échappe à
ton emprise." Et il disparut.
Peu après, le Prince se trouva face à une seconde
porte. On pouvait y lire "CHANGE LES AUTRES".
"C'était bien là mon intention, pensa-t-il.
Les autres sont source de plaisir, de joie et
de satisfaction mais aussi de douleur, d'amertume
et de frustration." Et il s'insurgea contre tout
ce qui pouvait le déranger ou lui déplaire chez
ses semblables. Il chercha à infléchir leur
caractère et à extirper leurs défauts.
Ce fut là son deuxième combat.
Bien des années passèrent.
Un jour, alors qu'il méditait sur l'utilité
de ses tentatives de changer les autres, il croisa
le Vieux Sage qui lui demanda : "Qu'as-tu appris
sur le chemin ?" "J'ai appris, répondit le Prince,
que les autres ne sont pas la cause ou la source
de mes joies et de mes peines, de mes satisfactions
et de mes déboires. Ils n'en sont que le
révélateur ou l'occasion. C'est en moi que
prennent racine toutes ces choses." "Tu as raison,
dit le Sage. Par ce qu'ils réveillent en toi,
les autres te révèlent à toi-même. Soit
reconnaissant envers ceux qui font vibrer en
toi joie et plaisir. Mais sois-le aussi envers
ceux qui font naître en toi souffrance ou
frustration, car à travers eux la Vie t'enseigne
ce qui te reste à apprendre et le chemin que tu
dois encore parcourir." Et le Vieil Homme disparut.
Peu après, le Prince arriva devant une porte
où figuraient ces mots "CHANGE-TOI TOI-MEME".
"Si je suis moi-même la cause de mes problèmes,
c'est bien ce qui me reste à faire," se dit-il.
Et il entama son 3ème combat. Il chercha
à infléchir son caractère, à combattre ses
imperfections, à supprimer ses défauts, à changer
tout ce qui ne lui plaisait pas en lui, tout
ce qui ne correspondait pas à son idéal.
Après bien des années de ce combat où il connut
quelque succès mais aussi des échecs et des
résistances, le Prince rencontra le Sage qui lui
demanda :
Qu'as-tu appris sur le chemin ?"
"J'ai appris, répondit le Prince, qu'il y a en
nous des choses qu'on peut améliorer, d'autres
qui nous résistent et qu'on n'arrive pas à
briser."
"C'est bien," dit le Sage.
"Oui, poursuivit le Prince, mais je commence à
être las de ma battre contre tout, contre tous,
contre moi-même. Cela ne finira-t-il jamais ?
Quand trouverai-je le repos ? J'ai envie de
cesser le combat, de renoncer, de tout abandonner,
de lâcher prise." "C'est justement ton prochain
apprentissage, dit le Vieux Sage. Mais avant
d'aller plus loin, retourne-toi et contemple
le chemin parcouru." Et il disparut.
Regardant en arrière, le Prince vit dans le
lointain la 3ème porte et s'aperçut qu'elle
portait sur sa face arrière une inscription qui disait
"ACCEPTE-TOI TOI-MEME."
Le Prince s'étonna de ne point avoir vu cette
inscription lorsqu'il avait franchi la porte la
première fois, dans l'autre sens. "Quand on combat
on devient aveugle, se dit-il." Il vit aussi,
gisant sur le sol, éparpillé autour de lui,
tout ce qu'il avait rejeté et combattu en lui :
ses défauts, ses ombres, ses peurs, ses limites,
tous ses vieux démons. Il apprit alors à les
reconnaître, à les accepter, à les aimer.
Il apprit à s'aimer lui-même sans plus se comparer,
se juger, se blâmer.
Il rencontra le Vieux Sage qui lui demanda :
"Qu'as-tu appris sur le chemin ?"
"J'ai appris, répondit le Prince, que détester
ou refuser une partie de moi, c'est me condamner
à ne jamais être en accord avec moi-même.
J'ai appris à m'accepter moi-même, totalement,
inconditionnellement."
"C'est bien, dit le Vieil Homme, c'est la première
Sagesse. Maintenant tu peux repasser la 3ème
porte."
A peine arrivé de l'autre côté, le Prince
aperçut au loin la face arrière de la seconde
porte et y lut
"ACCEPTE LES AUTRES".
Tout autour de lui il reconnut les personnes
qu'il avait côtoyées dans sa vie ; celles qu'il
avait aimées comme celles qu'il avait détestées.
Celles qu'il avait soutenues et celles qu'il avait
combattues. Mais à sa grande surprise, il était
maintenant incapable de voir leurs imperfections,
leurs défauts, ce qui autrefois l'avait tellement
gêné et contre quoi il s'était battu.
Il rencontra à nouveau le Vieux Sage. "Qu'as-tu
appris sur le chemin ?" demanda ce dernier.
J'ai appris, répondit le Prince, qu'en étant en
accord avec moi-même, je n'avais plus rien à
reprocher aux autres, plus rien à craindre d'eux.
J'ai appris à accepter et à aimer les autres
totalement, inconditionnellement." "C'est bien,"
dit le Vieux Sage. C'est la seconde Sagesse.
Tu peux franchir à nouveau la deuxième porte.
Arrivé de l'autre côté, le Prince aperçut la
face arrière de la première porte et y lut
"ACCEPTE LE MONDE".
Curieux, se dit-il, que je n'aie pas vu cette
inscription la première fois. Il regarda autour
de lui et reconnut ce monde qu'il avait cherché à
conquérir, à transformer, à changer. Il fut frappé
par l'éclat et la beauté de toute chose. Par leur
perfection. C'était pourtant le même monde
qu'autrefois. Etait-ce le monde qui avait changé
ou son regard ?
Il croisa le Vieux Sage qui lui demanda.
"Qu'as-tu appris sur le chemin ?"
"J'ai appris, dit le Prince, que le monde
est le miroir de mon âme. Que mon âme ne voit
pas le monde, elle se voit dans le monde.
Quand elle est enjouée, le monde lui semble gai.
Quand elle est accablée, le monde lui semble
triste. Le monde, lui, n'est ni triste ni gai.
Il est là ; il existe ; c'est tout. Ce n'était
pas le monde qui me troublait, mais l'idée que
je m'en faisais. J'ai appris à accepter sans
le juger, totalement, inconditionnellement."
C'est la 3ème Sagesse, dit le Vieil Homme.
Te voilà à présent en accord avec toi-même, avec
les autres et avec le Monde." Un profond sentiment
de paix, de sérénité, de plénitude envahit le
Prince. Le Silence l'habita. "Tu es prêt,
maintenant, à franchir le dernier Seuil, dit
le Vieux Sage, celui du passage du silence de
la plénitude à la Plénitude du Silence".
Et le Vieil Homme disparut.