lundi 5 novembre 2012

Abîme de l'amour

Depuis longtems j'ai perdu connoissance ;
Dans un gouffre je me vis abîmer ;
Je ne puis plus supporter la science ;
Heureux mon cœur, si tu sais bien aimer.



Perdu, plongé dans des eaux ténébreuses,
Je ne vois rien, et je ne veux rien voir ;
Mes ténèbres sont des nuits amoureuses ;
Je ne connois mon bien ni mon espoir.



Dans ce profond d'amour inexplicable,
On m'élève bien au-dessus de moi ;
C'est un nuage obscur, invariable,
Où l'âme ne voit qu'une sombre foi.



C'est un brouillard plus clair que la lumière ;
Je ne puis exprimer sa sombre nuit :
On ne dessille jamais la paupière ;
Dedans ce lieu l'on n'entend aucun bruit.



Ces ténèbres où règne le silence,
Font le bonheur de ce cœur amoureux ;
Tout consiste dedans la patience
Qu'exerce ici cet amant généreux.
 
Madame Guyon

 
 
 


 

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